• Le crash du FX54 relaté par son pilote le Cdt Avi e.r. Theo Everaert 
  • Conclusion de l'enquête - Photos

 

Par un vendredi ensoleillé, le 16 Septembre 1980.

 

Nous sommes le vendredi 16 Septembre 1980, et la météo est particulièrement clémente en ces derniers jours de l'été.
Deux pilotes de la 350ème escadrille du 1Wing de Chasse Tout Temps se préparent pour un vol d'entrainement à basse altitude.
La mission est prévue pour débuter dans nos Ardennes et se terminer par une attaque simulée de la base de Florennes.
Le Capt Theo Everaert, leader de cette mission pilotera le FX54 tandis que son ailier, le Lt René Vervoort pilotera le FX57.

Un problème technique sur le F-104G du Capt Everaert, va le forcer à abandonner son avion et s'éjecter au dessus des Ardennes Françaises.
Il sera le dernier pilote du 1Wing de Chasse Tout Temps à s'éjecter d'un F-104G.

Ci-dessous le recit qu'il nous fait de cette mission. 

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L'histoire qui suit se déroule par un beau vendredi ensoleillé, le 16 Septembre 1980 à 16h16.

La mission prévue est un Pair Leader Check du Lt René Vervoort et est "briefée" de la manière suivante :

René est le leader pour notre décollage en formation, il doit ensuite prendre un cap vers les Ardennes à 1000 pieds/sol.


Après avoir effectué trois circuits en Low Level Battle à 500 pieds, il doit reformer sur moi et devenir mon ailier pour une mission "Blue Strike" sur EBFS (Florennes), mission supposée tester les réactions et compétences du système de défense de l'aérodrome appelé LAA. (Light Aircraft Artillery)

Tout se passe comme prévu jusqu'à ce que je prenne le "lead" et me dirige vers Bouillon avec l'intention de surprendre la défense anti-aérienne de Florennes en abordant la base par le Sud.


Juste avant d'entamer mon virage à Couvin, je ressens soudaienement un choc comparable à un "Bird Strike" et le moteur se met immédiatement à vibrer.
De la fumée remplit ausitôt l'entièreté du cockpit et des vapeurs de carburant commencent à m'agresser à la fois la gorge et les yeux. A ce moment, nous volons à 500 pieds à la vitesse de 450 noeuds.

Je tire directement sur le manche et gagne de l'altitude tout en demandant à René de prendre le "lead" car je viens de me prendre un "bird strike".
Ma vitesse résiduelle amène le FX54 à 6000 pieds, j'ajuste ensuite mon taux de descente afin d'afficher une "glide speed" de 300 noeuds.
Je sélectionne le régulateur d'oxygène sur 100% et ouvre la "Fresh Air Scoop", ce qui rend immédiatement le vol plus confortable.

A partir du moment où le moteur à commencé à vibrer fortement, j'ai réduit le "Throttle" en "Idle" ; en conséquence j'ai perdu mon écran radar, et deux "Emergency Lights" se sont allumées l'une après l'autre, HYD 1 d'abord, suivie de HYD 2.

Tout en continuant de descendre en plané, je regarde René et évalue ma descente, et commence à chercher la cause de cet "Audio Warning" qui me casse les oreilles...
Finalement, je note la "FIRE warning light" allumée devant mon nez et demande à René si il peut confirmer que mon avion est en feu ou pas.
Il me répond qu'il voit seulement de la fumée blanche s'échapper de mon cockpit !

Je ne regarde pas vraiment les deux indicateurs EXT TEMP et PERCENT RPM, mais je dois savoir si mon moteur fourni encore de la poussée, je pousse donc le "Throttle" en Full (Mil) puis Full A/B...
Une fraction de seconde plus tard, je suis de nouveau en IDLE !
Après deux explosions impressionnantes, je suis heureux de constater que mon avion est toujours en un seul morceau !

Je regarde à l'extérieur et je note que les petites habitations dispersées dans les Ardennes françaises deviennent de plus en plus grosses, et j'estime qu'il est maintenant plus que temps de m'éjecter.
"René I'm bailing out" est la dernière transmission que reçoit René avant de me voir quitter le FX54 !

J'essaye de suivre toute la séquence et garde mes yeux grands ouverts. J'ai l'impression de rester longtemps accroché à mon siège, mais la séparation s'exécute finalement et le "Survival Kit" se déploie sous mes pieds. Je vois mon "dinghy" se gonfler et j'atterri sur lui un instant plus tard, auprès d'un monsieur qui est occupé dans son jardin potager.

René Vervoort de son côté perd assez rapidement Theo de vue après son éjection et prend dès lors de l'altitude afin de ne pas le gèner dans sa descente.  Après avoir contacté Belga Radar il restera encore un moment à la verticale du lieu du crash, mais il finira par se divertir sur Florennes par manque de carburant.
Après refueling il redécollera un peu plus tard vers Beauvechain.

Peu après, j'apprends que mon avion s'est crashé verticalement dans un champ situé à 6 kms de mon point d'attérrissage non loin du village de Authe.
Par chance, personne n'a été blessé lors de l'impact, c'est le plus important.

 

Le rapport de mon ailier René Vervoort qui stipule qu'il a noté de la fumée blanche s'échapper du cockpit sera d'une grande utilité pour les enquêteurs américains qui trouveront assez rapidement la cause du crash.
Deux valves de surpression situées sur le réservoir à carburant principal se sont bloquées provoquant la surpression et rupture du réservoir.
Le carburant ainsi libéré dans la structure de l'avion a alors été aspiré par le compresseur du moteur J-79 qui l'a transformé en vapeur.
Une partie de cette vapeur de carburant a trouvé un chemin de sortie via les prises de Bleed Air et tout en passant pas le système de conditionnement d'air a ensuite été transmise au cockpit.
Le reste des vapeurs a continué son chemin vers les chambres de combustion où ce mélange hautement explosif est mis à feu avec les conséquences que l'on connait.

Le moteur J-79 sera retrouvé au fond d'un trou d'une profondeur de 10 mètres et dès lors qu'il sera examiné, il deviendra évident que le moteur a été soumis à un excès de carburant, car les chambres de combustion seront retrouvées soudées entre-elles !


                            Theo Everaert 
                            Cdt Avi (Ret.)

 

 

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